Rapport sur les tendances en consommation – Chapitre 4 : Littératie et éducation des consommateurs

Chapitre 4 – Littératie et éducation des consommateurs

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Tout comme le niveau d'instruction des Canadiens augmente avec le temps, les connaissances et la littératie nécessaires aux consommateurs pour réussir à s'orienter sur le marché se compliquent. Cependant, tant à titre de membres de la population active qu'à celui de consommateurs, certains Canadiens se tiennent au courant d'un marché qui devient de plus en plus complexe, tandis que d'autres n'arrivent visiblement pas à suivre. Le présent chapitre examine les tendances en ce qui concerne le niveau de scolarité de différents groupes démographiques au Canada, en mettant l'accent sur la littératie requise par le marché.

4.1 Des consommateurs plus instruits

En moyenne, les consommateurs canadiens sont plus instruits que jamais auparavant. Au cours des 20 dernières années, la proportion de Canadiens âgés de 25 ans et plus ayant un niveau d'instruction postsecondaire est passée de 29 % en 1981 à 48 % en 2001 (voir la figure 4.2). D'après Statistique Canada, en 2001, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) classait le Canada au quatrième rang des pays membres pour ce qui est de la proportion de la population en âge de travailler titulaire d'un diplôme universitaire164. Cependant, si l'on inclut les deux systèmes parallèles d'éducation après le secondaire au Canada, en ajoutant le nombre de diplômés des universités et des collèges communautaires, les Canadiens arrivent en tête des pays de l'OCDE pour ce qui est de la proportion de la population ayant une éducation collégiale ou universitaire.

La recherche donne à penser qu'une augmentation du niveau d'instruction peut entraîner un comportement plus efficace chez le consommateur, comme le fait de payer moins cher pour les mêmes produits et services (DRHC et OCDE, 2000). L'augmentation du niveau d'instruction au Canada se fait, toutefois, à un coût croissant. En effet, l'élément frais de scolarité dans l'indice des prix à la consommation (IPC) augmente en moyenne de 8 % par an depuis 1980, soit deux fois le taux moyen de l'ensemble de l'IPC165. Pour beaucoup de Canadiens, s'instruire davantage dépend donc fortement de la façon dont ils gèrent leurs dépenses d'éducation croissantes et leurs prêts d'études.

Les coûts croissants de l'éducation

Les études coûtent de plus en plus cher aux jeunes Canadiens. Entre 1992 et 2002, la composante des frais de scolarité de l'IPC a augmenté de 8,1 % par an en moyenne, contre 3 % pour l'ensemble des articles pris en considération. Pour les ménages faisant état de frais de scolarité postsecondaires, cela représente un changement important de la part relative de l'éducation dans leurs dépenses. En 2002, par exemple, ces frais dépassaient en moyenne leurs dépenses alimentaires (voir la figure 4.1). Pour faire face à leurs frais de scolarité, les étudiants empruntent plus (voir le chapitre 8). Ce coût plus élevé des études explique peut-être aussi en partie pourquoi une plus grande proportion de jeunes de 25 à 29 ans vivent encore chez leurs parents. On est, en effet, passé de 12 % en 1981 à 24 % en 2001 (Statistique Canada, 2002b).

Figure 4.1

Frais de scolarité postsecondaires et dépenses alimentaires, en moyenne, par ménage les déclarant, 1992-2002

Source : Statistique Canada, Enquête sur les dépenses des familles (1982, 1986 et 1002) et Enquête sur les dépenses des ménages (1997 et 2002).

Figure 4.2

Diplôme le plus élevé obtenu, par groupe d'âge, Canada (1981, 1991 et 2001)

*Le groupe d'âge des 15 à 24 ans a été supprimé du total des groupes d'âge afin de prendre en considération le niveau d'instruction atteint relativement final.

Source : Calculs du Bureau de la consommation fondés sur des données de Statistique Canada, no au Catalogue 97F0017XCB01002.

Certains lient les progrès récents dans le niveau de scolarité à une plus grande demande de compétences sur le marché du travail et au fait que la politique d'immigration met l'accent sur les compétences (Couton, 2002). D'après la recherche, cependant, la situation difficile à laquelle ont été confrontés les jeunes pendant la récession des années 1990 a sans doute influé sur les décisions prises par le groupe de jeunes Canadiens qui a suivi. En 2001, le niveau de scolarité des personnes âgées de 25 à 34 ans a effectivement augmenté sensiblement par rapport à celui des groupes précédents du même âge. L'augmentation de la proportion de Canadiens dans ce groupe d'âge qui avaient des titres universitaires en 2001 était particulièrement élevée, soit 28 %, alors qu'elle était de 17 % à 18 % durant les deux décennies précédentes. Ces jeunes Canadiens avaient de 15 à 24 ans au début des années 1990, ce qui signifie que pendant la récession, ils étaient en âge de peser le pour et le contre de la poursuite d'études postsecondaires par rapport à l'entrée sur le marché du travail. Il est possible, comme il était difficile de trouver un emploi, que les membres de la génération qui a suivi celle du baby-boom aient choisi de poursuivre leurs études (Statistique Canada, 2003).

L'évolution de l'éducation des consommateurs définira le troisième âge de demain

Si l'on prend les caractéristiques relatives à l'éducation des groupes d'âge de la cohorte du baby-boom, il est raisonnable de s'attendre à ce que les personnes âgées de demain possèdent des compétences sensiblement différentes de celles des consommateurs âgés d'aujourd'hui. Ainsi, en 1977, seulement 6 % des femmes âgées de 45 ans à 49 ans qui travaillaient, avaient un diplôme universitaire. En 1997, cette proportion était passée à 19 % des femmes âgées de 45 ans à 49 ans qui travaillaient (membres du baby-boom) (Earl, 1999). Pour les hommes, cette proportion était de 9,5 % en 1977 et de 23,1 % en 1997. On ne s'attend donc pas à ce que les futures générations de personnes âgées aient grand-chose en commun avec la génération précédente. « Grâce à une instruction plus poussée et à une vie professionnelle plus variée, les aînés de demain pourraient avoir une meilleure connaissance des programmes et services gouvernementaux et communautaires […] [et] revendiquer peut-être plus fermement leur dû » (CCNTA, 1999, p. 5-6), tant comme consommateurs que comme citoyens.

Depuis 1990, pour pratiquement tous les emplois nets créés, les candidats à l'emploi devaient avoir une éducation postsecondaire. Entre 1990 et 2002, un peu plus de 3 millions d'emplois nets créés nécessitaient une éducation postsecondaire (voir la figure 4.3). La plupart de ces emplois (81,7 %) étaient à plein temps. En comparaison, il y a eu parallèlement une perte nette de plus de un million d'emplois pendant cette période pour les travailleurs sans diplôme d'études secondaires, la majorité de cette perte (88,1 %) touchant des postes à plein temps. Les emplois nets créés pour des Canadiens titulaires d'un diplôme d'études secondaires (mais sans diplôme d'études postsecondaires) étaient positifs, quoique d'une très petite marge, tant pour les emplois à plein temps qu'à temps partiel.

Figure 4.3

Emplois nets créés, par niveau d'instruction, 1990–2002

Source : Calculs du Bureau de la consommation fondés sur des données de Statistique Canada, séries v2582419 à v2582424 et v2582428 à v2582433 de CANSIM.

Fait intéressant, un rapport de recherche de Statistique Canada conclut que, malgré le passage à une économie du savoir et une proportion croissante de travailleurs canadiens plus instruits, l'avantage relatif de l'éducation, pour ce qui est de la rémunération et de la probabilité de trouver un emploi, n'a pas changé. Plus particulièrement, le rapport explique que :

Les travailleurs plus instruits gagnent davantage et leur probabilité de travail est plus élevée que celle des travailleurs moins instruits, mais pas plus qu'auparavant. Selon certaines recherches, cela s'expliquerait par l'augmentation rapide de l'offre de travailleurs très instruits au Canada, qui compense l'augmentation de la demande de main-d'œuvre. (Heisz et al., 2002, p. 30-31)

Le travail indépendant, autre nouvelle possibilité de travail importante

Un rapport de 2000 explique que, pour des raisons pas tout à fait claires, il y a eu un changement sensible dans le type d'emplois créés au cours des deux dernières décennies, puisque l'on est passé principalement d'emplois salariés à plein temps dans les années 1980 à un travail indépendant dans les années 1990 :

Pendant le cycle des années 1990 jusqu'à maintenant (de 1989 à 1998), les emplois rémunérés à temps plein ont représenté seulement 18 % de la création nette de tous les emplois au Canada. Pendant le cycle des années 1980, le taux était de 58 % […] Le travail indépendant représentait environ 58 % de la fluctuation nette pendant les années 1990, [et] seulement 18 % pendant les années 1980. » (Picot et Heisz, 2000, p. 5)

Le passage relatif au travail indépendant a eu plusieurs conséquences importantes pour les consommateurs. Par exemple, les revenus des travailleurs indépendants sont plus polarisés que ceux des travailleurs salariés. Ainsi, en 1995, environ 45 % des travailleurs indépendants gagnaient moins de 20 000 $ par an et 4 % gagnaient plus de 100 000 $, tandis que la proportion de travailleurs salariés gagnant ces sommes étaient de 26 % et 1 % respectivement (Statistique Canada, 1997a). En outre, bon nombre de travailleurs indépendants ne bénéficient peut-être pas d'avantages sociaux importants offerts aux travailleurs salariés, comme la couverture de l'invalidité, le congé parental, les régimes de retraite et l'assurance-emploi (Hughes, 2003). Toutes choses étant égales par ailleurs, l'absence d'avantages sociaux peut avoir une incidence négative sur la consommation, car ces personnes risquent de devoir épargner plus pour amortir le poids de l'incertitude, que ce soit du point de vue des perspectives de travail ou de la santé. Malgré ces désavantages, les travailleurs choisissent peut-être une activité indépendante tout bonnement par préférence. Les membres des professions libérales, par exemple, jouissent d'une plus grande autonomie en étant travailleurs indépendants (Krahn, 1995, p. 35). Il ressort d'une étude américaine que les femmes, notamment celles qui ont de jeunes enfants, sont plus enclines que les hommes à déclarer que la souplesse de l'horaire de travail et les obligations familiales sont des raisons importantes pour choisir une activité indépendante (Boden, 1999).

L'éducation postsecondaire est maintenant un minimum que les Canadiens doivent avoir pour tout simplement maintenir un niveau de vie comparable à celui des générations précédentes. Une proportion croissante de la population en âge de travailler de demain semble comprendre ces exigences, même dans le climat d'emploi favorable des dernières années, et elle choisit des études plus longues. Ainsi, en 1991, 32 % des jeunes adultes âgés de 20 à 24 ans étaient aux études à plein temps, mais en 2001, il y en avait environ 4 sur 10 dans ce cas (Statistique Canada, 2003).

Le manque d'instruction nuit encore à certains consommateurs

Malgré l'augmentation relative du niveau d'instruction, certains groupes de Canadiens restent plus vulnérables à cause de leur scolarité inférieure à la moyenne. En 2001, 57 % des personnes âgées n'avaient pas de diplôme d'études secondaires (Statistique Canada, 2003). Le faible niveau d'instruction figure parmi les facteurs de risque socio-économiques reconnus qui influent sur la sécurité des personnes du troisième âge (Gouvernement de la Colombie-Britannique, 1999), facteurs qui augmentent la vulnérabilité aux fraudes.

Les personnes âgées peu instruites ne sont pas les seules à être exposées à des risques. Étant donné les exigences du marché du travail actuel, il est préoccupant de constater qu'environ un jeune adulte sur sept âgé de 25 à 34 ans en 2001 n'avait pas terminé ses études secondaires (Statistique Canada, 2003). Cette tendance est lourde de conséquences pour ces jeunes Canadiens en tant que consommateurs sur un marché où l'information occupe une place de plus en plus importante. Les niveaux de scolarité et la littératie sont étroitement liés. Ainsi, les personnes âgées de 20 à 29 ans qui n'ont pas fait d'études secondaires obtiennent, dans les tests de littératie, des notes nettement inférieures à celles des diplômés. De plus, les résultats à ces tests pour les décrocheurs canadiens du secondaire sont nettement inférieurs à ceux des décrocheurs d'autres pays : « [leur niveau d'alphabétisation] est en fait si faible que le niveau global d'alphabétisation du Canada est l'un des moins élevés des pays membres de l'OCDE malgré le fait que le Canada possède l'un des pourcentages les plus élevés de diplômés de niveau postsecondaire » (DRHC, 2000, p. 29). Ces consommateurs prennent des décisions de consommation indépendantes sur des questions essentielles (logement, transports, alimentation), souvent pour la première fois. Comme même ces choix élémentaires peuvent demander l'analyse de renseignements compliqués, ces consommateurs se trouvent très désavantagés à cause de leur faible niveau de scolarité et de littératie.

Cependant, acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour faire face aux exigences du marché ne signifie plus seulement éduquer les jeunes :

La mondialisation des marchés, la rapidité et la fluidité des communications, le renouvellement rapide des connaissances et des technologies, les changements sociaux accélérés, le maintien ou la réinsertion sur le marché du travail, la complexification de la vie sociale sont autant de facteurs qui exigent de la part de tous les adultes une formation de base suffisante et la mise à jour de leurs compétences pour s'adapter à ces réalités. (Ministère de l'Éducation du Québec, 2001, p. 3)

Dans une enquête réalisée en 1997, 28 % des Canadiens âgés de 17 ans ou plus déclarent participer à des cours d'éducation et de formation des adultes, ce qui en fait un volet important de l'éducation et de la formation en général166. Malgré cela, une « loi d'inégalité » générale inquiète au Canada, car les données suggèrent que plus le niveau d'instruction atteint est élevé, plus la personne a de chances de prendre part à l'éducation des adultes (Statistique Canada, 2001, p. 18). Au Canada, comme dans plusieurs autres pays de l'OCDE, il existe un risque de marginalisation croissante de grands groupes en dehors de la société d'apprentissage naissante (OCDE et Statistique Canada, 2000, p. 43), c'est-à-dire ceux qui ont besoin d'améliorer leurs compétences, mais dont il est moins probable qu'ils participeront à l'éducation structurée et non structurée.

Possibilités de recherche

L'incidence négative sur la consommation d'un lourd endettement étudiant à long terme peut être compensée par de meilleures perspectives d'emploi, une meilleure rémunération et la capacité d'affronter la complexité du marché. Les effets conjugués d'une meilleure éducation, de l'endettement et du marché nécessitent une analyse plus approfondie.

Les comparaisons entre les défis en matière d'achat rencontrés par les personnes âgées d'aujourd'hui et les personnes âgées mieux éduquées de demain pourraient amener à des changements utiles sur le marché et dans les politiques. Il serait également bon de mieux comprendre comment les jeunes moins instruits s'en sortent sur le marché. Ces jeunes ont de nombreuses caractéristiques en commun avec les personnes âgées, dont on sait combien elles risquent d'être victimes de fraudes. Il pourrait être beaucoup plus facile de bien protéger les jeunes vulnérables en adaptant à leurs besoins particuliers des programmes qui marchent pour les personnes âgées. Il serait bon d'étudier de plus près le manque potentiel de choix sur le marché pour les jeunes vulnérables (dû à leur incapacité de démêler des éléments complexes) et leur impression de se heurter à des obstacles sur certains marchés (par exemple, dans le secteur bancaire).

4.2 Enjeux liés à la littératie des consommateurs

La littératie est extrêmement importante parce que « Qu'il s'agisse de possibilités d'emploi, de réussite professionnelle ou de pleine participation à la vie sociale, culturelle et communautaire, la société récompense ceux qui possèdent des capacités de lecture élevées et pénalise ceux qui possèdent de faibles capacités de lecture » (Statistique Canada, 1997b, p. 1). Les capacités de lecture et d'écriture jouent un rôle essentiel dans bien des aspects du comportement des consommateurs. La notion de littératie a évolué et s'est élargie avec le temps :

L'alphabétisme est une nouvelle notion qui désigne bien plus que la capacité fondamentale de lire et d'écrire que l'on trouve dans l'alphabétisation. En effet, l'alphabétisme est défini par des niveaux de capacités de lecture, lesquels reflètent l'aptitude des personnes à comprendre et à utiliser l'information; cette aptitude est essentielle dans un monde où les activités quotidiennes exigent des capacités plus élevées en matière de communication et de traitement de l'information. (Statistique Canada, 1997b, p. 1)

Au milieu des années 1990, une initiative majeure a été lancée afin de remédier au manque de données sur la littératie. L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes (EIAA) était un effort commun de plusieurs gouvernements, bureaux de la statistique nationaux et organisations internationales, Statistique Canada jouant un rôle important dans la préparation et la gestion de l'enquête. Celle-ci a été réalisée en trois étapes dans 23 pays (9 pays y ont participé en 1994, 5 en 1996 et 9 en 1998) (OCDE et Statistique Canada, 2000, p. ix). Alors que bien d'autres études traitaient la littératie comme une condition absolue, autrement dit, des compétences que les adultes avaient ou n'avaient pas, l'EIAA mesure les capacités en lecture et en écriture sur un continuum général. Dans son cadre conceptuel, l'EIAA définit la littératie comme étant :

La capacité de comprendre et d'utiliser l'information imprimée pour fonctionner en société, réaliser ses objectifs personnels et développer ses connaissances et ses potentialités. (OCDE et Statistique Canada, 2000, >p. x)

L'EIAA a révélé que, dans l'ensemble, le Canada se classait mieux que les États-Unis mais nettement moins bien que la Suède, pays le mieux classé du monde en ce qui concerne la littératie (voir la figure 4.4). D'après Statistique Canada, comparé aux 19 autres pays, le Canada se classe au 5e rang pour ce qui est des capacités de lecture à l'égard de textes suivis (les États-Unis arrivent au 10e rang), 8e pour ce qui est des capacités de lecture à l'égard de textes schématiques (les États-Unis sont 13e) et 9e sur l'échelle quantitative (les États-Unis sont 12e). Les données montrent également que quatre Canadiens sur dix âgés de 16 à 65 ans appartiennent aux deux groupes les plus faibles (niveau 1 ou 2) sur les trois échelles de littératie, autrement dit à des niveaux de littératie inférieurs au seuil minimal souhaitable (Statistique Canada, 2000).

Figure 4.4

Pourcentage de la population âgée de 16 à 65 ans à chaque niveau de littératie, au Canada, aux États-Unis et en Suède*, 1994–1998

* Sur les 22 pays, la Suède est celui qui a obtenu le plus haut pourcentage d'adultes entrant aux niveaux 4 et 5 pour les trois concepts de littératie (contenu quantitatif, textes schématiques et textes suivis).

Source : La littératie à l'ère de l'information : rapport final de l'Enquête internationale sur la littératie des adultes,OCDE et Statistique Canada, 2000 (tableau 2.2, p. 136-137).

L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes

L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes comprenait une série de tâches destinées à évaluer trois concepts de littératie.

Capacités de lecture à l'égard de textes à contenu quantitatif : Les connaissances et les compétences devaient s'appliquer à des opérations arithmétiques sur des nombres inscrits dans des documents imprimés (par ex., tenir son compte en banque, remplir un bon de commande, calculer le montant des intérêts sur un prêt à partir d'une publicité).

Capacités de lecture à l'égard de textes schématiques : Les connaissances et les compétences devaient permettre de localiser et d'utiliser l'information sous diverses présentations (par ex., tableaux, graphiques, cartes).

Capacités de lecture à l'égard de textes suivis : Les connaissances et les compétences devaient permettre de comprendre et d'utiliser l'information contenue dans divers types de textes (par ex., journaux, brochures, modes d'emploi).

À chaque tâche testée dans l'EIAA correspondait un certain nombre de points, allant de 0 à 500. Autrement dit, plus la tâche était difficile, plus le nombre de points était élevé. Ensuite, ces points ont été divisés en cinq grands niveaux de littératie.

Le niveau 1 dénote un niveau de littératie très faible, auquel la personne a du mal à s'acquitter des tâches les plus élémentaires (par ex., déterminer la bonne dose de médicament à partir de l'information fournie sur l'emballage). Une personne se trouve au niveau 1 quand elle peut faire toutes les tâches de ce niveau ou quelques-unes ou encore aucune, mais ne se trouve pas au niveau 2.

Le niveau 2 est un niveau où les répondants ne peuvent se débrouiller qu'avec des documents clairs et simples et où les tâches ne sont pas très compliquées. Cette catégorie comprend des personnes qui ont peut-être adapté leurs compétences plus faibles à la vie quotidienne mais ont peut-être du mal à apprendre de nouvelles tâches nécessitant plus de compétences sur le plan de la littératie.

Le niveau 3 est considéré comme le seuil minimal souhaitable en matière de littératie dans beaucoup de pays.

Les niveaux 4 et 5 correspondent à des compétences plus importantes, comme la capacité d'intégrer plusieurs sources d'information ou de résoudre des problèmes compliqués.

Source :DRHC, 2003.

L'EIAA a révélé une corrélation importante entre les compétences sur le plan de la littératie et l'âge (voir la figure 4.5). Plus particulièrement, les Canadiens âgés risquaient beaucoup plus de présenter des niveaux de littératie inférieurs. L'échelle relative aux capacités de lecture à l'égard de textes schématiques a révélé que le pourcentage de Canadiens âgés de 15 à 24 ans appartenant aux deux niveaux les plus bas (32,7 %) était de moitié inférieur à celui des adultes en âge de travailler (67,2 % pour les 55 à 64 ans) et des personnes âgées (79,3 % des 65 ans et plus) (Statistique Canada, 1998, p. 51, tableau 2.1).

Fait intéressant, toutefois, beaucoup de personnes âgées analphabètes ne se rendent pas compte d'une déficience dans leurs compétences sur le plan de la littératie, ou ne l'admettent pas. Ainsi, 63,8 % des personnes âgées de 65 ans et plus appartenant au niveau 1 (lecture, échelle relative aux capacités de lecture à l'égard de textes suivis) estimaient leur capacité de lecture « de bonne à excellente » (Statistique Canada, 1998, p. 63, tableau 2.17).

Figure 4.5

Proportion de Canadiens à chaque niveau de littératie, selon l'âge

Source : Littératie, économie et société.OCDE et Statistique Canada, 1995, p. 153, Table B-11b.

La littératie est pratiquement essentielle dans les bonnes décisions d'achat. Si les mauvaises décisions découlant de compétences insuffisantes sur le plan de la littératie peuvent entraîner des coûts financiers ou matériels pour le consommateur, les mauvaises décisions relatives aux produits de santé sont particulièrement inquiétantes. Ainsi, Statistique Canada fait remarquer que 72 % des Canadiens âgés de 65 ans et plus appartenant au niveau 1 en matière de littératie (échelle relative aux capacités de lecture à l'égard de textes suivis) déclarent ne pas avoir besoin d'aide pour lire les instructions sur les flacons de médicament (Statistique Canada, 1998). Aux niveaux de littératie 3, 4 et 5 pour la même échelle, ce pourcentage est de 98 %. Beaucoup de personnes âgées se voient prescrire de multiples médicaments, parfois par des médecins différents. Étant donné les conséquences possibles de l'ingestion d'une mauvaise dose ou du mélange de certains médicaments délivrés sur ordonnance, les difficultés de certaines personnes âgées en matière de littératie constituent un sujet de préoccupation important sur le marché. De plus, on a relevé une corrélation importante entre la littératie et l'état de santé général. En voici une explication possible :

Les personnes qui ont des capacités [de littératie] plus élevées peuvent rester en meilleure santé parce qu'elles sont capables de comprendre et d'interpréter l'information sur la santé. Elles sont peut-être également plus en mesure d'adopter des pratiques de santé préventives et de déceler des problèmes, de manière à être traitées plus tôt, ou de faire des choix de soins de santé appropriés. (DRHC, 1996, p. 7).

D'autres tâches de l'EIAA démontrent également une relation évidente entre la littératie et les questions relatives au marché concernant les consommateurs. Ainsi, une tâche de niveau 3 pour les textes suivis renvoyait les répondants à une page d'un manuel du propriétaire d'une bicyclette afin de savoir comment s'assurer que la selle est dans la bonne position; 42,2 % des Canadiens âgés de 16 à 65 ans n'ont pas atteint le niveau 3 à cette question et n'avaient donc pas les compétences voulues pour s'acquitter de cette tâche. Dans une tâche de niveau 3 sur l'échelle des textes schématiques, les répondants devaient utiliser un horaire d'autobus pour trouver l'heure d'arrivée du dernier autobus le samedi soir, et 42,9 % des répondants n'ont pas réussi à le faire (OCDE et Statistique Canada, 2000). Enfin, pour une tâche de niveau 4 sur l'échelle de textes à contenu quantitatif, les répondants devaient utiliser un graphique pour calculer la somme d'argent qu'ils auraient après avoir investi 100 $ sur 10 ans167, et 77,8 % n'ont pas su faire ce calcul (OCDE et Statistique Canada, 1997, p. 128). Ces exemples montrent bien que les personnes qui n'arrivent pas au niveau de littératie minimal 3 ont de gros problèmes sur le marché.

Des connaissances financières sont essentielles

À moins d'avoir des connaissances financières, les consommateurs s'exposent à des fraudes ou à une mauvaise gestion du crédit, par exemple. Alan Greenspan, président de la Réserve fédérale américaine, a fait remarquer ceci lors du lancement d'une initiative d'information économique et financière :

[TRADUCTION] En mettant l'accent sur l'amélioration des connaissances mathématiques élémentaires et des capacités de base à résoudre des problèmes, on peut former des consommateurs avisés capables de profiter pleinement des services financiers de pointe offerts sur un marché en constante évolution. (Greenspan, 2003)

Il ressort d'une enquête réalisée par un groupe de consommateurs québécois que les personnes âgées et les consommateurs canadiens à faible revenu ont des connaissances financières inférieures à la moyenne. Les participants devaient répondre à 17 questions d'ordre financier. Le nombre moyen de réponses exactes était de 7,2, mais seulement de 5,2 pour les personnes âgées et de 5,5 pour les personnes appartenant à des ménages dont le revenu annuel est inférieur à 20 000 $ (Fédération des ACEF du Québec, 2001). Une autre enquête sur les investissements, réalisée par la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, conclut ceci :

Seuls 18 % des Ontariens s'estiment très au courant en matière d'investissements. Et 26 % des personnes interrogées ne comprennent pas un des préceptes fondamentaux en matière d'investissement - le rapport entre le risque et le rendement -, ce que les organismes de réglementation jugent préoccupant. (Conacher, 1998)

Bon nombre d'aspects de la politique de protection des consommateurs dans le secteur des services financiers reposent sur le principe de divulgation. Bien que l'on insiste sur l'utilisation d'un langage clair, une évaluation de 1998 sur l'intelligibilité de documents financiers courants conclut que leur compréhension nécessitent dans tous les cas une éducation collégiale ou universitaire et que presque tous sont soit « difficiles » soit « très difficiles » à lire (Colbert, Carty et Beam, 1999). Donc :

Les constatations de cette section de l'étude [du Groupe de travail] indiquent un grand fossé entre les caractéristiques des documents et la capacité de les comprendre des personnes visées. Elles indiquent que le but de ces documents est une communication en réponse aux exigences de la réglementation plutôt qu'une communication authentique avec les consommateurs. (Colbert, Carty et Beam, 1999, p. 58)

Possibilités de recherche

L'énorme proportion de Canadiens dont la littératie est insuffisante pour une bonne interaction avec le marché devrait beaucoup inquiéter. Il devient urgent, en l'absence de solutions au problème de littératie en soi, de trouver des moyens efficaces pour qu'ils puissent plus facilement s'informer en tant que consommateurs. Les dangers pour la santé qu'une piètre littératie fait courir aux Canadiens âgés ont été décrits. Une analyse approfondie des autres risques pour le bien-être des consommateurs âgés-fondés sur la littératie pourrait aider à trouver des moyens d'améliorer leur interaction avec le marché.

Au-delà des capacités de lecture élémentaires, des connaissances financières sont indispensables à la sécurité à long terme de la plupart des consommateurs. À une époque où les ménages manquent de temps, où les programmes scolaires changent et où le marché regorge d'information, des études plus poussées sur les connaissances financières nécessiteront de nouvelles évaluations des connaissances des consommateurs. Elles devront aussi voir en quoi la divulgation de l'information peut contribuer à renforcer la protection des consommateurs.

Notes en bas de page

164Le Canada n'était devancé que par les États-Unis, la Norvège et les Pays-Bas. Voir Statistique Canada, 2003. Retour au texte

165L'IPC est calculé en moyenne pondérée d'indices des prix de certaines marchandises, et les pondérations sont révisées périodiquement et issues de données d'enquêtes telles que l'Enquête sur les dépenses des ménages. D'après l'Enquête sur les dépenses des ménages de 2001, 83 % des dépenses correspondant aux frais de scolarité visaient l'éducation postsecondaire. L'élément frais de scolarité de l'IPC est donc une bonne approximation des tendances de ces frais. Retour au texte

166Un apprenant adulte exclut généralement tous les étudiants réguliers à plein temps et autres étudiants âgés de 17 à 24 ans. Cependant, la définition inclut les étudiants à plein temps subventionnés par les employeurs, les étudiants à plein temps âgés de plus de 19 ans inscrits dans des programmes d'études élémentaires ou secondaires, et les étudiants à plein temps âgés de plus de 24 ans inscrits à des programmes d'études postsecondaires. Dans la question posée dans le sondage, la formation et l'éducation étaient définies comme étant des cours, des leçons privées, des cours par correspondance (écrits ou électroniques), des ateliers, une formation en apprentissage, et les cours d'art, d'artisanat et de loisirs, ou toute autre formation ou éducation. D'après l'Enquête sur l'éducation et sur la formation des adultes présentée dans le rapport, il y a cinq fois plus d'étudiants adultes que d'étudiants à plein temps (classés comme jeunes). Voir Statistique Canada, 2001. Retour au texte

167Cette tâche a été classée au niveau 4 parce que le graphique ne présentait de données que sur le montant des intérêts gagnés. La personne devait additionner cette somme au montant principal (soit 100 $) pour arriver à la bonne réponse (OCDE et Statistique Canada, 1997). Retour au texte